Extrait : WONDERLAND - Prologue

Dans un monde où Célestes et Infernaux s’affrontaient depuis la nuit des temps, Allister Iscariot était le pire héritier dont pouvait cauchemarder le Royaume des Pécheurs.

D’ailleurs, Allister, c’est moi. Coucou !

Si j’étais un si mauvais prince, c’était parce que j’étais né mi-ange mi-démon — un sang-mêlé qu’on nommait aussi nephilim — et que j’étais censé rejeter ma part angélique pour embrasser celle démoniaque, afin de pouvoir succéder à la régente Asmodée.

Asmodée, autrement dit ma mère, la Princesse Infernale des Luxurieux et reine de l’Enfer, en plus d’être l’épouse de Satan, mon père et diable en titre.

Actuellement, elle régentait aussi le Royaume des Pécheurs, en attendant que je la remplace sur le trône avec ma sœur Myriam.

Un héritage que, bien évidemment, je me refusais à accepter.

Parce que soyons clairs : non seulement je n’avais pas la moindre envie d’hériter de quoi que ce soit, mais, en plus, j’avais la fâcheuse tendance à toujours faire l’inverse de ce qu’on attendait de moi.

Comprenez ici que j’étais un sale gosse.

Mais Allis, de quoi tu nous parles au juste ? En résumé, je devais prendre la tête des Pécheurs, une sorte de société dans la société qui régissait les Infernaux vivant sur terre et aspirait à dominer le monde surnaturel.

Beaucoup trop de responsabilités pour moi.

Notez d’ailleurs que je détestais ce mot : responsabilité.

En plus, je ne voyais pas pourquoi on aurait eu besoin de moi sur le trône des Pécheurs, puisque ma sœur Myriam — qui devait régner à mes côtés en tant que Céleste, pour sa part — aurait fait un bien meilleur démon que moi.

Oui, parce que le grand truc de nos parents, c’était de nous voir embrasser une de nos deux natures chacun pour pouvoir monter ensemble sur le trône et rallier ainsi anges et démons à notre cause.

Mais franchement, avait-on vraiment besoin de gouverner aussi les Célestes vivants sur terre ?

La réponse était non : ils n’avaient qu’à se débrouiller entre eux.

Enfin voilà, comme Myriam était une reine née et qu’elle avait tout de l’Infernale par excellence, elle pouvait bien prendre le trône toute seule comme une grande.

C’était pour ça qu’un jour glorieux — alors que je me remettais d’une soirée et d’une gueule de bois mémorables —, j’avais pris la décision qui s’imposait : j’avais plié bagage et m’étais tiré de chez moi sans même laisser un petit mot. À partir de ce moment, Myriam allait devoir gérer pour nous deux.

Problème ? Alors que tout se passait plutôt bien dans ma nouvelle vie, j’étais tombé amoureux au point de risquer de faire ma transition angélique. Ce qui risquait de foutre en l’air tous mes plans : moi Céleste, Myriam abandonnée devenue Infernale, mes parents auraient enfin eu ce qu’ils voulaient.

Ça craignait un max.

J’étais donc parti en beauté, laissant littéralement mon cœur derrière moi — avec l’homme que j’aimais, précisément —, et ayant volé mon boss qui n’était autre que l’un de ses parents proches — en plus d’être un gangster —, histoire qu’ils me détestent tous et ne me regrettent pas. Ensuite, j’avais pris la direction de l’aéroport, cap sur le bercail, où je comptais me fondre dans la masse et refaire ma vie incognito.

Alors oui j’étais triste de laisser mon chéri derrière moi, mais je ne pouvais pas prendre un si gros risque. Il était tout simplement hors de question que je finisse le cul vissé sur un trône à prendre de lourdes décisions que je ne comprendrais même pas.

Finalement, j’étais plutôt altruiste : je protégeais tous les sujets du royaume en leur évitant d’être gouvernés par moi.

Oui, je sais, c’était une excuse ridicule, et oui, j’étais déjà super malheureux d’être loin de lui. Mais c’était fait, il me restait juste à espérer que je n’avais pas fait tout ça pour rien.

Spoiler alert : je croyais visiblement aux miracles.